Krzysztof Kieslowski, pour l'amour de l'autre (2018)
Un documentaire de Dominique Prusak, réalisé par Anna Szmuc et diffusé dans le cadre de la série de France Culture “Une vie, une œuvre” a été consacré à Kieślowski en 2018. Il est disponible en baladodiffusion|podcast. En fil rouge, Alain Martin nous entraîne sur les pas de Kieślowski à Paris.
Photo : Irène Jacob participe à l'émission, interrogée par Dominique Prusak - © a. martin
Une heure pour comprendre la vie et l’œuvre de Kieślowski
[[am, 14+22-05-18]] Ce long portrait radiophonique de 60 minutes : Krzysztof Kieślowski : pour l’amour de l’autre, a été diffusé sur France Culture le samedi 5 mai à 15h. Puis en podcast sur le site de France Culture, une vie une œuvre. Réalisation : Anna Smuck, production : Irène Omélianenko, liste des intervenants ci-dessous.

[ Rue Mouffetard : le café de Julie (Trois couleurs : Bleu) en 2018, avec toujours un musicien en face - photo © alain martin ]
Le fil rouge : une balade sur les pas (parisiens) de Kieślowski
L’émission comporte une balade sonore qui nous conduit des hauts de la Place Clichy (à Paris), au pied de l’immeuble où Kieślowski résidait en 1992, jusqu’au Palais de Justice (l’ancien, pas le nouveau !) où le coiffeur Karol Karol (
Blanc, 1993) comparaissait. On passe aussi par Saint-Lazare (où Kieślowski réussit à tourner une séquence de
La Double vie… un petit exploit logistique) en passant par le quartier Mouffetard où Julie (
Bleu, 1992) se réfugie après la mort de son mari et de sa fille dans un terrible accident… Alain Martin profite de l’ambiance des lieux de tournages, pour revenir sur la personnalité de Kieślowski et sa manière de diriger ses équipes, d’en tirer le meilleur, mais aussi de savoir choisir chacun, de déléguer, puis d'exprimer sa reconnaissance.
20 mars 2018, au pied de l’appartement de Kieślowski
Rendez-vous était pris le matin, au pied de l’immeuble où le réalisateur polonais résidait durant le tournage des
Trois couleurs. Un point de départ pour évoquer cet épisode parisien, mais aussi pour revenir sur l’enfance polonaise, lorsque Kieślowski suit son père malade, de sanatorium en sanatorium, dans de nombreuses villes du Sud de la Pologne. Le jeune Krzysztof est observateur, actif et parfois même dissipé, n’est pas bien fixé sur son avenir. Une première rencontre avec le monde du théâtre (il étudie la peinture de décors au lycée technique à Varsovie) le pousse à tenter le concours de la célèbre école de Łódź, non pas pour faire du cinéma, mais dans la perspective d’obtenir un diplôme de metteur en scène et de continuer sa voie dans la direction théâtrale. La suite est plus connue : il est admis (au troisième essai), et finit par se consacrer au cinéma, plus particulièrement au documentaire. Alain Martin nous entraîne ensuite place Clichy, au
Wepler, quartier général parisien de Kieślowski, qui ne se sentait pas à l’aise pour travailler dans les bureaux. De même qu'il avait hanté les salons de l’Hôtel
Europejski à Varsovie, c’est là qu’il rencontre beaucoup de ses collaborateurs français. Ici aussi, devant le cinéma
Wepler, Karol Karol, le héros malheureux de
Trois couleurs : Blanc peine à reconquérir sa femme française qui a demandé le divorce…
Véronique à Saint-Lazare
L’équipe suit ensuite Alain Martin à Saint-Lazare, où celui-ci explique les conditions très particulières du tournage de
La Double vie de Véronique (la Gare accueillant parcimonieusement les équipes de cinéma sur les quais, vu l’affluence permanente de cette croisée des chemins parisiens). Il parle aussi de la confection par l'ingénieur du son de cette étrange cassette, bourrée d’indices sonores et envoyée à Véronique par le marionnettiste rencontré à Clermont-Ferrand…
Une après-midi dans le Quartier Latin
L’après-midi, tous montrent patte blanche pour accéder dans les salles du Palais de Justice (l'ancien, dans l'Ile de la Cité) où furent tournés le même jour le début de
Blanc (le procès de Karol Karol) et plusieurs séquences de Julie dans
Bleu. Une journée mémorable, avec Kieślowski et ses deux chefs-opérateurs arpentant les grandes salles sonores. Puis c’est dans le quartier de Julie, près de la rue Mouffetard, que l’on enregistre la suite de l’émission. Alain Martin y démontre la précision du réalisateur, sa manière de diriger mais aussi d’accueillir les propositions des équipes, son souci parfois maladif du détail (quel temps exact doit mettre un sucre à s’imprégner de café, dans la tasse de Julie ?), son attention aux réactions du spectateur, et aussi à ceux dont on ne fait pas grand cas comme la vieille femme à la bouteille, qui apparaît dans plusieurs films, depuis le
Décalogue. La suite dans l’
émission de France Culture, avec les interventions en Pologne et en France des intervenants (ci-dessous).
Un choix délicat des intervenants
Dominique Prusak, qui suit de longue date (lui aussi) le travail de Kieślowski et de ses collaborateurs, a enfin mené à bien un projet qui lui tenait à cœur depuis plusieurs années et mené les interviews en Pologne et en France. Nous avons assisté à la construction de l'émission, à ses premières interrogations, sa sélection des témoins, ses départs pour Varsovie où il a rencontré les témoins pour construire un portrait le plus fidèle possible de Kieślowski. Car 60 minutes, c’est très court, quand il s’agit de clarifier l’homme derrière l’œuvre, de produire une émission sensible et juste. Mission accomplie ? On peut le penser, de part le titre de l’émission, qui évoque le regard humaniste du cinéaste polonais, et de ce que nous avons pu entendre des témoignages recueillis. Pour Dominique, l’homme (et la vie) doivent éclairer l’œuvre. Il semble même que sa passion a été contagieuse, puisque le journaliste nous a confié que plusieurs personnes ayant participé à l’élaboration de l’émission, connaissant plutôt le cinéaste par les articles de presse (et ses films, bien sûr), avouaient avoir changé d’avis et mieux saisi la personnalité de Krzysztof Kieślowski.
Avec les témoins polonais et français, à l’écoute de l’homme derrière l’œuvre
Pour revenir sur le parcours, le caractère, les rapports avec les équipes, la manière d’observer… vous entendrez sept témoins…
Côté polonais :
- Marta Kieślowska-Hryniak parle de son père ; elle avait déclaré un peu auparavant à Istambul que même s’il était souvent absent pour ses tournages, il avait su entretenir un lien fort avec elle, par sa présence entière à son retour, sa capacité d’écoute
- Krystyna Janda, grande comédienne polonaise, a tourné avec Wajda, Bugajski, Zanussi, plusieurs réalisateurs français… et elle est l’héroïne du Décalogue 2
- Urszula Lesiak, assistante sur le montage de La Double vie de Véronique, s’est ensuite vue confier par Kieślowski le montage de “Trois couleurs : Blanc”
- Jacek Petrycki était le chef-opérateur de nombreux documentaires et fictions, de Przed Rajdem (Avant le Rallye - 1971) à Bez końca (Sans fin -1984) ; il témoigne régulièrement en Pologne et en France lors de festivals ou de colloques
- Krzysztof Zanussi, cinéaste et directeur de TOR Studio Filmowe, a produit de nombreux films de Kieślowski, avant que celui-ci prenne la direction exécutive de l'unité, pendant que Zanussi voyageait à la recherche des co-producteurs et des distributeurs à l’étranger.
Côté français :- Irène Jacob, double-rôle titre de “La Double vie de Véronique” puis Valentine dans “Rouge”, et associée au succès européen des derniers films de Kieślowski, raconte la richesse de cette rencontre et le travail exigeant sur le dernier opus
- Alain Martin, spécialiste français de Kieślowski (quatre livres parus, de nombreux témoins rencontrés et la participation à de nombreux débats et rencontres en France et à l’étranger) donne beaucoup d'éléments sur la personnalité du cinéaste et nous emmène à travers Paris sur les traces des tournages de Bleu et de Blanc.
Plus d’infos sur les balades avec Alain Martin sur les pas de Kieślowski à venir…